ça nous a fait tout un foin il y a une semaine et après plus rien, puisque le rapport n'était pas officiellement remis à la ministre, mais bon, ça agace de lire des choses sans pouvoir lire l'intégralité du document pour se faire une véritable idée. Et comme google est l'ami de l'internaute, en lui demandant gentiment, on finit par trouver le fameux rapport dans sa version .exe cad sans image et avec traits de coupe, mais qu'importe puisque c'est le texte qui compte.
Morceaux choisis du Rapport 2008 du CES (comité de suivi et d'évaluation) de l'ANRU : Rénovation urbaine 2004-2008 – Quels moyens pour quels résultats ?
Pour mettre dans l'ambiance, voici le tout premier paragraphe de ce rapport, ceux qui ont lu les précédents rapports du CES savent qu'il a régulièrement la critique acerbe sur l'ANRU mais ce rapport prend une dimension toute particulière au regard de la situation économique internationale.
Première phrase du préambule (page 7) signée de la main de Yazid Sabeg, président du CES.
Les inégalités cumulées et transgénérationnelles – pour l’accès à la réussite scolaire, aux transports, à l’emploi, à la formation, à la culture, ou encore à la santé – se cristallisent sur des territoires urbains bien délimités. La ségrégation dans les quartiers défavorisés et le déterminisme social qui y règne risquent ainsi de condamner à l’échec et au chômage une part croissante de la population, majoritairement issue de l’immigration.
Et je vous mets le 4° paragraphe de la même page pour le plaisir.
Une telle persistance de la polarisation des territoires traduit une calcification croissante de la société, qui alimente déjà des conflits sociaux majeurs, dont les violences urbaines chroniques en sont les manifestations les plus évidentes.
Première partie : Les objectifs du PNRU seront-ils atteints ?
Chapitre 1 – Où en est le PNRU ?
L’état d’avancement « administratif » du PNRU
page 21 : La programmation du PNRU est en cours d’achèvement. Le potentiel de réservation de 12 milliards d’euros sera en effet prochainement atteint. Près de 80 % des quartiers potentiellement éligibles aux subventions de l’ANRU font l’objet d’un projet de rénovation urbaine. Au 1er juin 2008, 269 conventions ont été conclues et soixante-deux projets de rénovation urbaine validés par le Comité d’engagement. Au total, les 331 projets validés concernent plus de 3 millions d’habitants et 434 quartiers.
page 22 : 88 % des quartiers prioritaires éligibles aux subventions de l’ANRU ont été validés par le Comité d’engagement, contre 71 % des quartiers dits supplémentaires. Les sites dits « prioritaires » ont donc bien été traités en priorité par l’ANRU et les porteurs de projet.
22 % des quartiers éligibles aux crédits de l’ANRU n’ont toujours pas fait l’objet d’un projet de rénovation urbaine au 1er juin 2008.
L’état d’avancement « physique » du PNRU
page 25 : Les chiffres de la programmation révèlent un décalage avec les objectifs fixés par la loi de cohésion sociale du 18 janvier 2005. L’objectif de 250 000 démolitions a de facto été réduit à 130 000 démolitions. [...]
Au fur et à mesure de la maturation des projets au niveau local, les démolitions ne se sont pas toutes avérées pertinentes. Leur coût excède parfois celui d’une réhabilitation, notamment dans le cas d’immeubles dont les coûts sont largement amortis. Dans un contexte de crise du logement social, il est aussi parfois difficile d’assurer le relogement des habitants des immeubles démolis. Enfin, l’attachement de nombreux habitants à leur logement a également entraîné sur certains sites une réduction du nombre de démolitions.
Chapitre 2 – Quelle mixité sociale dans les quartiers en 2013 ?
page 35 : L’évolution récente de la programmation des démolitions et des constructions de
logements sociaux prévoit un léger accroissement du déficit de la reconstitution de l’offre locative sociale. 4 % des démolitions ne seront pas compensées par une reconstruction au terme du programme. Le déficit devrait alors atteindre près de 5 000 logements locatifs sociaux.
En matière de reconstitution de l’offre, le CES alerte l’ANRU sur la réduction du nombre de pièces des logements, la faible part des logements très sociaux (8,5 % des constructions) et l’importance des reconstitutions sur certains sites, notamment en Île-de-France.
page 45 : Le relogement sur place prédomine (de 50 à 89 % des ménages) notamment dans les ZUS de grande taille (Montereau, Trappes) mais le relogement hors site peut avoir été favorisé comme à Corbeil, Vitry et Montreuil, par une forte volonté municipale. Partout, la part du relogement dans le neuf reste marginale et la part des relogés dans le quartier représente au moins la moitié des ménages. En définitive, le souhait de mobilité des ménages est rarement satisfait (18 et 48 %). Les relogements dans le quartier ne concernent donc pas nécessairement des ménages qui avaient émis le désir d’y rester et inversement.
Les loyers du parc consacré au relogement s’avèrent nettement supérieurs à ceux du parc d’origine – de 20 à 80 % des logements nouveaux ont un loyer plus élevé. Le taux d’effort des ménages, y compris celui des ménages relogés dans un logement de même taille ou plus petit, s’accroît. Un quart au moins
des ménages seraient concernés par cette augmentation.
page 46 : Pour un grand nombre de ménages, le relogement n’a pas engendré de changements significatifs. Les caractéristiques de leur nouveau logement – taille, loyer, quartier – restent identiques ou les atouts et les inconvénients se compensent et rendent l’analyse plus mitigée.
De surcroît, le relogement ne modifie ni la situation personnelle ni la vie quotidienne des habitants, pour l’accès aux transports, aux équipements collectifs, à la vie de quartier ou encore la proximité familiale.
[...]
Les femmes âgées isolées vivent relativement mal le relogement, quel qu’il soit, en raison de leur âge, de l’attachement à leur logement et à leur voisinage établit, source de solidarité qu’elles craignent de perdre.
D’autres ménages subissent le relogement. Les ménages anciennement installés dans le quartier et captifs de leurs conditions de logement vivent comme un déclassement leur relogement dans un quartier et/ou un immeuble défavorable aux plans de la réputation, du voisinage (conflits) et de la gestion.
Les ménages fragilisés, les familles monoparentales et les grandes familles influent peu sur leurs propres parcours et sont dans une situation de dépendance vis-à-vis des instances locales. Leur principale revendication est leur maintien dans un logement de même taille et de limiter le reste à charge. Leur seule opportunité est un logement social, souvent localisé dans le même quartier, dans un immeuble ancien.
Chapitre 3 – Quel effet de levier des PRU sur le développement économique et social des quartiers ?
page 63 : Le développement urbain durable – environnemental, économique et social – doit se traduire dans les quartiers par des actions au bénéfice direct de leurs habitants. Ceux-ci doivent voir leur mobilité s’accroître, leurs charges locatives se réduire et la gestion de leur quartier s’améliorer.
page 64 : Le CES a rappelé que le désenclavement des quartiers pour leur réinsertion dans les agglomérations ne consiste pas simplement à implanter davantage d’équipements et de services dans les quartiers pour « refaire la ville sur place ». Il s’agit aussi de relier les habitants des quartiers pour qu’ils accèdent à des équipements et à des services collectifs en dehors des quartiers et plus largement aux fonctions économiques, sociales, de la vie publique et culturelle de la ville et de l’agglomération dans son ensemble.
page 69 : L’ensemble des PRU n’a pas fait l’objet d’une concertation approfondie avec les habitants. De nombreux acteurs considèrent en effet que la vision globale de l’avenir des quartiers ou les questions stratégiques et techniques, qui dépassent la compétence d’usage des habitants, ne ressortissent pas de l’autorité de ces derniers.
page 70 : L’implication des habitants dans la gestion urbaine de proximité (GUP) est indispensable pour la pérennisation qualitative du projet. Les habitants, premiers utilisateurs des espaces et des services au quotidien, ont une compétence d’usage et contribuent, avec les gestionnaires et prestataires de service, au fonctionnement du quartier.
Partie 2 : Réaffirmer la priorité de la « lutte anti-ghetto »
Chapitre 1 – Les moyens consacrés au PNRU sont-ils à la hauteur de son ambition ?
page 74 : L’ANRU a attribué 10,5 milliards d’euros de subvention aux 331 projets validés par le Comité d’engagement au 1er juin 2008. Les projets qui portent sur une centaine de quartiers – en cours definalisation – engageront les 2 milliards d’euros de crédits restants.
Le conventionnement incertain de la totalité des quartiers éligibles selon les critères de l’ANRU et les incertitudes quant au financement de la totalité du programme ont conduit le président de l’ANRU à demander 1 milliard à 1,5 milliard d’euros supplémentaire à l’État pour boucler le programme.
[...]
Alors que la quasi-totalité des crédits de l’ANRU sont affectés, les coûts de réalisation des projets en cours ne cessent de croître pour plusieurs raisons :
• La progression de 24,6 % de l’indice global du coût de la construction (ICC), entre le premier trimestre 2003 et le quatrième trimestre 2007 . Les coûts de production (prix de revient en euros/m| de surface utile) des logements sociaux auraient augmenté plus rapidement encore, de 37 % entre 2003 et 2007 en France métropolitaine. Cette hausse considérable des coûts contribue à la
multiplication des appels d’offres infructueux et au ralentissement des opérations ANRU.
• L’augmentation du taux du livret A, qui renchérit le coût de la construction de logements sociaux. Le taux du livret d’épargne populaire est en effet passé de 2,25 % à 4 % entre 2004 et 2008.
• La mise en place de normes de construction plus contraignantes, notamment des normes d’accessibilité et de développement durable, qui renchérissent les coûts de construction de logements.
• Le retard dans le démarrage des opérations – en moyenne de 650 jours en 2007 – qui ralentit la mise en oeuvre des PRU. À cet égard, les plannings d’opérations actés dans les conventions initiales étaient, pour la plupart, excessivement optimistes et prévoyaient des délais d’engagement et de réalisation trop resserrés. Le conventionnement sur cinq ans est insuffisant pour que les partenaires locaux des PRU gèrent les études de définition, la saturation des entreprises de BTP, les problèmes liés au foncier, à l’ingénierie et à la gouvernance des projets. Cet accroissement des délais entraîne inévitablement un surcoût pour les projets ANRU.
[...]
Par ailleurs, les revues de projet et les points d’étape organisés par l’ANRU et les avenants aux conventions engendrent de nouveaux besoins pour accroître la dimension intégrée et l’ambition des PRU.
page 76 : Avec l’achèvement de la programmation des crédits de l’ANRU, les avenants – qui permettent l’ajustement et l’évolution des PRU – se font depuis 2006 à budget constant, par redéploiement des crédits surévalués ou non consommés inscrits dans la convention initiale. Les PRU en cours de mise en oeuvre ne peuvent ainsi plus faire l’objet d’amodiation en profondeur.
[...]
Dès 2006, la Direction générale de l’ANRU a alerté les délégués territoriaux sur la multiplication des demandes d’avenants. « Face à des avenants qui sont de nature à rompre [la] logique contractuelle » l’ANRU rappelle que « l’objectif de contenir les dépenses dans des enveloppes prévisionnelles est l’un des principes fondamentaux des conventions pluriannuelles », dont « dépendra [sa] capacité [à] financer l’ensemble des quartiers éligibles » .
page 77 : Si l’engagement financier de l’État en faveur de la rénovation urbaine a plus que doublé entre 2003 et 2007, l’ensemble des crédits qui lui sont alloués reste faible – seulement 384 millions d’euros de crédits de paiement en 2007, sur un budget global du programme « Ville et Logement » de 7,1 milliards d’euros.
Chapitre 2 – Après l’ANRU
page 87 : Les crédits alloués au PNRU I se révèlent insuffisants pour faire face à l’immensité de la tâche que constitue la rénovation urbaine. Le maintien de l’engagement de l’État au-delà de la période contractuelle est incertain.
[...]
Or les crédits de l’ANRU s’épuisent, et l’on peut désormais s’interroger sur les conditions d’une prolongation du PNRU et de son financement, voire sur la capacité de l’Agence à achever le programme contractualisé en cours.
page 92 : L’ambition initiale du PNRU – réinsérer les ZUS dans la dynamique des agglomérations – grâce à une intervention massive et ciblée pourrait ne pas être atteinte en 2013.
D’une part, la faible actualisation des crédits de l’ANRU, sous la pression de la hausse des coûts de construction, ainsi que la procédure d’avenants à budget constant, réduisent l’ambition et la globalité urbaine, sociale et économique de nombreux projets.
D’autre part, le financement de plus de 120 quartiers ANRU n’est pas encore assuré, sans compter le nombre de quartiers non éligibles aux crédits de l’Agence, dont les handicaps urbains, sociaux et économiques justifieraient pourtant son intervention.
Un PNRU II, dont l’objectif, les modalités et les missions seraient redéfinis, devrait donc figurer à l’ordre du jour gouvernemental, pour confirmer la priorité à la « lutte anti-ghetto ».
page 92 : Les projets de rénovation des quartiers prioritaires portent majoritairement sur des périmètres très importants (quartiers de 10 000 à 25 000 habitants). Ceux-ci ont été dimensionnés pour permettre une transformation durable et profonde sous cinq ans. Or ces projets n’ont souvent pas bénéficié de moyens suffisants pour être conçus avec ambition sur le long terme (10-15 ans). La réalisation des premières opérations révèle la nécessaire prolongation des projets concernés.
Et tout compte fait dans notre mentalité étriquée d'habitants débiles incapables de saisir à long terme les ficelles de l'ANRU, on avait quand même raison de s'interroger sur la suite de notre ORU et notamment son financement puisque même le CES de l'ANRU s'en inquiète.
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