tout tourne au ralenti, le chantier de la MPT et celui de la salle polyvalente tirent sur leur fin, celui de l'ORU n'est qu'un vaste terrain vague aux dénivelés variants au gré des engins du chantier, le temps devient moins propice aux promenades et les soirées commencent à tirer en longueur propices à la réflexion.
Du coup, me voilà, à faire une note sur un sujet que je n'avais pas prévu de traiter ici : les grèves de gardiens d'immeubles en régions parisiennes (voir par ici ou encore là).
Je n'en avais pas parlé, ici, à cause de notre gardienne toute neuve, parce que je trouvais de mauvaise augure de parler de choses qui ne se passent qu'à Paris, si loin de notre paisible quartier de province.
Pourtant, j'avais noté la news et même si la source nourrit un certain côté sensationnel, les anecdotes racontées sont effarantes (le gars qui se fait péter la gueule parce que la fille d'un locataire est bloquée dans l'ascenseur, c'est chaud...). Bref, à l'époque, ça m'avait amené à une réflexion personnelle entre le paradoxe de la situation extrême décrite dans les articles de presse et la réalité joyeuse de notre gardienne toute neuve.
Ensuite, difficile de se faire une véritable idée quand on est pas sur place, les gardiens en question sont-ils logés avec les locataires ? Notre gardienne "la plus vieille en poste" venant de la région parisienne, elle nous avait expliqué que là-bas on pouvait être gardien d'un bloc sans y habiter... Et, amha, il y a une énorme différence entre le gardien qui réside sur site et tisse nécessairement un minimum de lien social avec les habitants qui sont aussi ses voisins et donc compagnons de galère (panne d'ascenseur, fuites diverses, coupures diverses, etc.) et le gardien qui vit hors-site et qui devient ni plus ni moins qu'une sorte de "sous" attaché de clientèle relégué au ménage et à la sortie des poubelles (pré-réquis minimum à la fonction de gardien).
Il est évident qu'avec l'optique parfois moyen-âgeuse qui anime nos quartiers (le tristement usuel jet de déchets divers par la fenêtre) ceux qui nettoient ces déchets soient vu comme la lie de l'humanité d'autant plus si celui-là n'habite pas sur site et ne partage un minimum de quotidien avec les habitants. ça pourrait sans doute être une explication aux violences décriées par les articles en référence.
Pourtant, il serait dommage d'arrêter la réflexion, ici, que le gardien ne soit pas respecté car étant en contact avec des éléments "impurs", soit, ça reste primitif comme raisonnement mais ça peut encore se concevoir et surtout s'arranger si on fait quelques efforts de pédagogie sur les règles d'hygiène élémentaire (lutte contre les rats, les cafards, etc.).
Par contre, on peut aussi y voir une stigmatisation des frustrations générées par la vie dans les quartiers souvent imputées au bailleur dont le gardien devient une sorte d'incarnation en forme de bouc-émissaire. Et cette vision éclaire sous un nouvel angle les agressions en question...
Le gardien devient alors une sorte de privilégié qui possède une écoute attentive du bailleur là où les autres locataires se voient souvent confronté à des fins de non-recevoir, en outre au lieu de payer son logement il est payé pour l'habiter (on est bien d'accord que c'est en réalité plus complexe mais qu'importe puisque c'est perçu ainsi...).
Et faut bien voir que quand on parle de quartier, on parle de misère, on parle de seuil de pauvreté et de chômage et quelque part, on pourrait presque comprendre - pas excuser, hein !- les violences auquel sont soumis les gardiens.
Et contre cette rancœur tenace qui anime les quartiers, la simple pédagogie ne suffira pas, on parle d'une situation enkysté depuis plusieurs dizaines d'années où la fatalité s'aborde comme un destin sans issue alternative.
Pour celui qui a tout perdu, tout le monde devient un ennemi potentiel susceptible d'avoir cautionner d'une manière ou d'une autre l'état des choses qui l'a mené dans la situation où il se trouve...
Et à fortiori tout représentant du bailleur quelque soit son niveau de responsabilité, y compris le gardien devient une sorte de coupable.
C'est comme ça que la loge de notre gardienne toute neuve s'est braqué la nuit dernière. Elle a beau vivre avec nous et partager nos galères, elle en reste pas moins pour certains une sorte de prolongation d'un bailleur souvent vécu comme injuste.
Et le pire de tout ça reste encore que des empreintes ont été relevées et ressemblent à celle de jeunes gens qui pourraient bien payer cher leur manière d'exprimer leur rage contre l'injustice...
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